Fem de Joan Nestle, une histoire du feminisme et lesbianisme dans les années 1950 aux USA.
Au début, j’ai eu du mal à comprendre car je comprenais pas le mot butch-fem, qui apparaissait partout sans réellement le définir. Ce terme sera décrit vers le milieu du bouquin mais aussi à travers sa double lecture.
La structure du livre est étonnante, c’est à la fois un reccueil historique qui rapelle ce que c’etait d’etre une femme lesbienne, vétue comme les hommes dans un milieu homophobe où la police des moeurs faisaient des descentes, où on pouvait etre tabassées, où yavait certain controle par exemple dans les toilettes, une personne à la fois, qui se traduisait par une file d’attente interminable et devenait un espace de jeu et discussion…
Et subitement, des passages érotiques, crue, puissant et poétique. Je m’y attendais pas vu que je n’ai pas lu la 4ème couverture et que j’en ais entendu parlé dans une vidéo autour de l’amour dans les livres. Le propos me semblait historique et une critique du feminisme qui avait réduit la butch-fem en une reprise des codes hétéronormés. Et non, ces passages érotiques explorent la butch-fem, celèbre son désir, affirme sa position. Ya quelque chose dans ce rayonnement qui fait l’essence de la butch-fem. Qui est magnifique.
Le dernier chapitre clot avec le lien entre la prostitution, les lesbiennes et les bonnes soeurs. Un mélange étonnant et une histoire que je ne connaissais pas nottament la période grecque, puis le XIX siècle avec son lot de lois absurdes, amer echo que nous observons en ce moment chez les américains et un peu partout dans le monde…Joan Nestle rappelle dans ses notes qu’elle n’est elle-meme pas historienne et qu’avec la compilation de ces sources elle a voulu un mélange à la fois factuel et provocateur. Et que c’est une invitation à explorer d’avantage ce pan de l’histoire
Au final, j’ai adoré ce bouquin tant son approche est disruptive, explosive et très riche historiquement. Et les petites notes de traductions de Noémie Grunenwald et Christine Lemoine sont assez chouette à lire, de comprendre comment elles interprète tel mot, traduisent l’anglais qui est non genré…
J’espère trouver et lire d’autre livres :)
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@livres
Une critique sur Babelio
En tant que lesbienne née dans les années 90’ en France, le terme “fem” a longtemps représenté pour moi une vision stéréotypée de la lesbienne hyper féminine, au contraire de la “butch” que je croyais être son pendant masculin.
Une vision schématisée, binaire et surtout fausse de la dynamique butch-fem et de la “femitude” que l’autrice m’a permis de détricoter au cours de cette lecture à la fois passionnante, sensible et sensuelle.
On y découvre sa joie d’être fem et s’émanciper des carcans de son époque, joie de vibrer dans sa sexualité et ses amours lesbiennes, mais aussi le cadre dans lequel elle choisit d’exprimer son genre et sa sexualité. La répression des “inverti.es” dans les années 50, la brigade des moeurs qui les traque dans les bars et lieux de rencontre, les codes savamment intégrés et les lignes de fuites trouvées pour s’aimer malgré tout.
Au fil des textes, Joan Nestle fait aussi régulièrement un parallèle entre sa construction de lesbienne fem dans les années 50 et la vision féministe des années 70’ de la dynamique butch-fem. Avec de l’amertume et de la tristesse parfois mais aussi une volonté immense de préserver la mémoire de son vécu et celui de ses camarades de l’époque.
“(…) beaucoup de lesbiennes me rejettent comme si j’étais une victime, une femme qui n’a pas eu le choix, mais ma vie dans toute sa vérité révèle une histoire fort différente. Nous, les fems, avons contribué à maintenir notre monde lesbien uni à une époque dangereuse. (…) Nous savions ce que nous voulions et c’était un exploit formidable pour des jeunes femmes des années 1950, à une époque où le pouvoir politique nous serinait qu’il fallait être dans la norme, se marier, avoir des enfants.”
Ce recueil montre pourquoi il est crucial de garder des traces de nos mémoires communes, évitant ainsi au temps et aux nouvelles théories de faire une relecture au mieux simpliste, au pire erronée, du contexte social et historique où s’ancre ces vécus.
Un énorme merci à N. Grunenwald, la fondatrice des éditions Hystériques et AssociéEs, et le reste de son équipe dont le travail est un vrai archivage et une mise en avant de textes essentiels. J’ai beaucoup pensé au cours de cette lecture à leur première publication “Stone Butch Blues” de Leslie Feinberg, qui est l’une des mes plus puissantes lectures et qui célèbre là aussi l’amour butch-fem (côté butch).
Lisez Joan Nestle, lisez Leslie Feinberg et faites circuler leurs oeuvres. le monde n’en sera que meilleur !